Bahá’ís du Canada English
Commentaire d’un point de vue bahá’í sur la déclaration du sommet des dirigeants religieux du G8

Commentaire d’un point de vue bahá’í sur la déclaration du sommet des dirigeants religieux du G8

Du 21 au 23 juin, Winnipeg accueillera plus de 80 dirigeants religieux du monde entier. Ce sera le cinquième Sommet des dirigeants religieux des pays du G8 et du G20. Le but du sommet est de rédiger conjointement un message qui sera adressé par les diverses collectivités confessionnelles aux dirigeants politiques qui participeront au sommet des G8 et G20 à Huntsville et à Toronto, du 25 au 28 juin.

Le sommet de cette année aura lieu à l’Université de Winnipeg, à l’invitation de Lloyd Axworthy, ancien ministre canadien des Affaires étrangères et président de l’Université. Au cours des derniers mois, les représentants bahá’ís ont participé activement au comité directeur, au comité de rédaction de la déclaration et au comité local d’organisation à Winnipeg. Un délégué bahá’í sera au nombre des dirigeants religieux et des représentants bahá’ís venus de France, d’Allemagne, du Royaume-Uni et des États-Unis participeront à titre d’observateurs.

Une ébauche de la déclaration devant être discutée par les dirigeants religieux a été rédigée et est disponible à l’adresse www.faithchallengeg8.com. On peut également y trouver les commentaires de seize collectivités et organisations confessionnelles, dont celui de la communauté bahá’íe du Canada.

Commentaire sur la déclaration des dirigeants religieux du G8 : un point de vue bahá’í

Les huit objectifs du Millénaire pour le développement, les OMD, sont les normes que nous devons instaurer, et cela le plus tôt possible. La déclaration des dirigeants religieux attire l’attention sur trois de ces objectifs qui portent sur les questions de la pauvreté, de l’environnement et de la paix. Ils sont particulièrement pertinents à une réunion des dirigeants politiques du monde, puisqu’ils nécessitent que les nations agissent de façon concertée. Malgré que les dirigeants se soient déjà rencontrés, les réponses demeurent plus lointaines que jamais.

Pourquoi les progrès sont-ils aussi hésitants?

Les bahá’ís croient que l’humanité possède les ressources matérielles et scientifiques nécessaires à la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement et à l’établissement d’une civilisation mondiale pacifique et équitable. Ils envisagent aussi un monde prospère, et une société efflorescente, puisque chaque personne aura l’occasion de contribuer au bien-être de l’humanité dans son ensemble.

Pour répondre adéquatement aux objectifs du Millénaire pour le développement, est-il nécessaire que les gouvernements reçoivent l’assurance que les populations, qui leur confèrent la légitimité, sont engagées envers le monde, au-delà de leur intérêt naturel pour le seul bien de leur pays, et sont conscientes de l’unicité et de l’intégrité de l’humanité? Nous sommes d’avis qu’un tel engagement général envers l’unité de l’humanité et un tel esprit de solidarité sont essentiels, si nous nous attendons à ce que les gouvernements passent outre à leur intérêt national étroit. Sans cette assurance de l’appui généralisé de la population, les gouvernements continueront à agir sur la base de ce qu’on a convenu d’appeler réalisme politique, d’un point de vue borné, plus néfaste que bénéfique, qui reflète une préoccupation limitée à leurs propres intérêts. Cette façon de voir et d’agir engendre une société mondiale de plus en plus fragmentée, inéquitable et angoissée – une société mondiale qui n’arrive pas à refléter la dignité et l’honneur que Dieu a conféré à l’humanité.

La déclaration des dirigeants religieux des G8 témoigne éloquemment du fait que nous sommes tous membres de la famille humaine. Voilà l’unité d’intention exprimée par les diverses confessions, ce qui indique que la population pourrait bien avoir compris avant ses dirigeants que nous devons être unis pour que la société puisse avancer.

« Le bien-être de l’humanité, sa paix et sa sécurité ne pourront être obtenus si son unité n’est pas fermement établie » écrivait Bahá’u’lláh, le fondateur de la foi bahá’íe, au dix-neuvième siècle, à une époque où, devant la montée du nationalisme militant et du matérialisme, les dirigeants religieux n’avaient malheureusement pas su défendre l’esprit de la vérité religieuse, plutôt que sa seule forme.

Les forces de l’irréligion et de ceux qui recherchaient le pouvoir comme fin en soi, ont saisi cette occasion, ce qui a entraîné un siècle de désastre et précipité le déclin des vérités spirituelles et des principes moraux dans la société. Ces principes et ces pratiques sociales peuvent le mieux être résumés par la règle d’or, l’axe central de toutes les grandes religions.

Auparavant reléguée dans le domaine privé, la religion a récemment fait irruption sur la scène publique, parfois à titre de problème plutôt que de solution. Malgré cela, les bahá’ís, comme les autres partenaires de la déclaration au Sommet des dirigeants religieux du G8, croient que la religion peut, et doit, contribuer à la société et au débat public. Quand on examine impartialement la situation, on constate que, partout dans le monde, les religions continuent de fournir plus de soins de la santé et de services éducatifs que bien des gouvernements. Pendant des siècles, les religions ont uni des populations distinctes pour former des sociétés de plus en plus nombreuses et complexes. Les collectivités confessionnelles étaient mondiales bien avant la mondialisation de l’économie. Les religions doivent à nouveau faire entendre leur point de vue et participer aux activités publiques partout dans le monde.

Si le monde a besoin que les organisations confessionnelles fournissent des services et encouragent les gouvernements, et les critiquent à l’occasion, il a davantage besoin qu’elles motivent et inspirent les gens, de manière à instiller en eux la volonté d’agir et à les inciter à prendre les mesures leur permettant d’abandonner un état de chose bien établi mais inacceptable.

Les adeptes forment la base des collectivités confessionnelles, c’est pourquoi, elles comprennent bien la souffrance que la pauvreté, l’instabilité économique, l’injustice et l’indigence causée par l’environnement imposent aux personnes, aux familles et aux collectivités locales. Elles ne sont pas des organisations à but unique, mais plutôt des collectivités complexes, souvent caractérisées par une grande diversité. Du fait que leurs valeurs sont communes à des groupes distincts d’adeptes, et maintenant à des collectivités confessionnelles distinctes, les religions sont familières avec les valeurs qui définissent la réalité humaine d’une façon qui met en évidence sa capacité de surmonter les difficultés de la vie. Elles croient que Dieu a doté l’esprit humain de la capacité de transcender le désespoir et la douleur.

Ces caractéristiques de la religion ne devraient pas demeurer une question privée. Elles devraient éclairer et inspirer le domaine de préoccupation public en aidant à développer un engagement public général envers une solidarité qui dépasse les frontières, envers la coopération, la générosité, et un renforcement de la volonté des gens de servir le bien public. Trop souvent on pense que l’unité et l’harmonie, la camaraderie, l’amitié et la bienveillance entrent en jeu seulement après que d’autres problèmes concrets ont été résolus. Toutefois les religions comprennent que ces capacités spirituelles, ainsi que la capacité qui nous a été conférée par Dieu de comprendre comment le monde de la nature fonctionne et de nous servir de la science pour notre bien-être sont en réalité les capacités les plus utiles de notre espèce. Elles sont indispensables à la survie et à la réussite de la famille humaine sur toute la planète. Si nous sommes honnêtes avec nous-mêmes, nous comprendrons que le niveau de souffrances et d’injustice qui existent actuellement dans le monde exige que les dirigeants et les populations en général réagissent en mettant à profit l’entraide mutuelle, la confiance et le sacrifice envers autrui, qui sont parmi les enseignements les plus importants de toutes les religions.

« Béni celui qui se lève pour servir les plus hauts intérêts des peuples de la terre. […] Ce n’est point aimer son propre pays dont il convient de se glorifier, c’est aimer le monde entier. » Voilà la norme évoquée par Bahá’u’lláh, qui rappèle les enseignements de d’autres messagers de Dieu au cours des âges. Alors que nous sommes confrontés à la pauvreté et à l’injustice, il nous dit : « Dites aux riches les soupirs nocturnes des pauvres, de peur que l’insouciance ne les conduise sur le chemin de la destruction et ne les prive de l’Arbre de richesse. »

Le Sommet des dirigeants religieux du G8 pourrait bien n’être qu’un pas vers le ravivement de l’esprit de foi dans la politie mondiale, encore loin des idéaux que la religion nous a toujours enseignés, mais il faut se réjouir de cet effort important, puisqu’il contribue au processus.