Evelyn Loft Watts et Patricia Verge ont écrit en collaboration une biographie marquante, celle de Melba et de Jim Loft, les premiers bahá’ís canadiens d’ascendance autochtone. Return to Tyendinaga [Le retour à Tyendinaga], l’histoire de Jim et de Melba Loft, pionniers bahá’ís, est une œuvre accomplie avec amour par les deux femmes, qui ont commencé à l’écrire peu de temps après le début de leur amitié, il y a douze ans. Pour Evelyn le livre revêt une signification particulière, car non seulement fait-il la chronique des origines de sa foi au sein de la population autochtone, mais il retrace aussi les racines spirituelles de sa propre famille.
La publication du livre racontant la vie de ses parents représente pour Evelyn la réalisation d’un souhait que son père, Jim Loft, avait exprimé alors que, toute jeune, elle manifestait du talent pour l’écriture. Elle se mit d’elle-même à faire des recherches pendant des années et accumula des volumes de documentation, rédigeant de courtes versions de la biographie des Loft. Elle choisit une carrière dans le domaine de l’écriture et travailla comme reporter judiciaire, éleva trois enfants et servit la Foi bahá’íe que ses parents lui avaient transmise; cependant, elle ne perdit jamais de vue le souhait de son père.
Pour Patricia Verge, le livre constitue un « bel exemple de coopération ». Les liens d’amitié qui unissent Evelyn et Patricia se sont tissés tout au long de quatre années, au cours de rencontres fortuites lors de conférences et de congrès bahá’ís; finalement, Evelyn invita Patricia à venir, de Cochrane en Alberta, lui rendre visite chez elle, à Cobourg en Ontario. Ensemble, elles allèrent dans un cimetière du territoire mohawk de Tyendinaga, là où les époux Loft sont enterrés avec Sam, leur fils ainé, mort tragiquement dans un accident de voiture en 1954. C’est à la suite de cette visite que Patricia décida d’offrir son aide pour publier la biographie quand celle-ci serait terminée.
En tant qu’auteure déjà publiée, Patricia comprenait l’importance de ce qu’Evelyn voulait accomplir, tout comme Evelyn comprenait le potentiel spirituel des peuples autochtones, potentiel que ses parents avaient travaillé à libérer. Ce même potentiel est mentionné dans la préface du livre, rédigée par le fils d’Evelyn, Bob Watts, Jr. :
Notre pays souffre, car le dynamisme, l’amour de la terre, le génie et le savoir sacré que possèdent les peuples autochtones du Canada, ne sont pas pris en compte dans le processus de construction de la nation. Melba et Jim connaissaient ces dons; ils connaissaient les qualités spirituelles de leur peuple et la beauté intrinsèque de celles-ci. Et c’est pour promouvoir l’épanouissement du potentiel de notre peuple, qu’ils ont quitté les États-Unis et sont revenus vivre au Canada. L’histoire de Melba et de Jim, bien qu’unique, est également représentative de l’extraordinaire potentiel qui existe dans les communautés des Premières Nations.
A l’automne 2005, la détérioration de sa santé poussa Evelyn à demander à Patricia de se charger du projet. Patricia hésita d’abord à accepter, mais après une autre visite à Cobourg au début de 2006, au vu de l’impressionnante quantité de documents qu’Evelyn avait réunis, elle comprit que le plus gros du travail était déjà fait. Patricia retourna chez elle en emportant la plupart des documents qu’Evelyn avait rassemblés et, deux ans plus tard, elle avait terminé une première ébauche de la biographie.
Elle en envoya des copies aux membres de la famille Loft afin qu’ils la révisent. La fille d’Evelyn, Susan Siwik, fut d’une grande aide en signalant des passages de la biographie qui devaient être révisés et en recueillant auprès de membres de la famille d’autres histoires de Jim et Melba, histoires qui, d’après Patricia, « enrichissent considérablement le livre, et le rendent plus personnel. » Patricia et la famille Loft ont utilisé le plus possible de ce qu’avait rédigé Evelyn, ainsi que des écrits de Melba Loft. À cause de l’apport d’informations de la famille, le livre est plus long que ce que Patricia avait imaginé au départ, mais, selon elle, c’est « un bien meilleur livre, grâce au processus de coopération. »
Écrire Retour à Tyendinaga fut très astreignant, mais étant donné la vie mouvementée de la famille Loft, cela n’a rien de surprenant. Jim Loft était d’ascendance autochtone. La terre de ses ancêtres était le territoire mohawk de Tyendinaga, mais il avait grandi dans la pauvreté à Oshawa, en Ontario. Melba loft, elle, grandit à Curve Lake, sur le territoire de la première nation ojibway; après leur mariage, le couple alla s’installer au Michigan. Une quête spirituelle, initiée par Melba, leur permit d’entrer en contact avec la communauté bahá’íe. Melba fut la première canadienne d’ascendance autochtone à devenir membre de la communauté, suivie peu de temps après par Jim.
La gentillesse des bahá’ís qu’ils rencontrèrent et surtout, les enseignements de Bahá’u’lláh concernant l’égalité des peuples, furent favorablement perçus par Jim qui, depuis l’enfance, avait connu le racisme. Sa nouvelle foi qui proclamait l’unité du genre humain suscita en lui le désir de partager avec d’autres la paix du cœur qu’il avait trouvé. Comprenant que la foi bahá’íe représentait ce que recherchait une grande partie de leur peuple, le couple revint, en 1949, au territoire mohawk de Tyendinaga, malgré les sacrifices que cela comportait. Les Loft étaient déterminés à vivre parmi leur peuple qu’ils aimaient profondément et à leur faire partager leur foi; ils s’installèrent d’abord dans une petite cabane sans électricité ni eau courante. Jim ouvrit un atelier de carrosserie, qui, par la suite, leur permit de se loger plus confortablement.
Malgré les difficultés, ils commencèrent à enseigner la foi bahá’íe par leur façon de vivre. Aujourd’hui encore on se souvient de leur amour pour les peuples autochtones qui se manifestait par le service aux autres. Au cours d’un lancement du livre tenu récemment au territoire mohawk de Tyendinaga, le chef Don Maracle a rappelé que les époux Loft vivaient selon le principe suivant : « Que les actes soient votre parure et non les mots. »
Maintenant que le livre est publié, Patricia fait remarquer avec humour qu’elle a l’impression de connaître un peu mieux Melba et Jim, tout au moins du point de vue spirituel, étant donné qu’elle ne les a jamais rencontrés. Tout comme le chef Maracle, Patricia pense que la vie des époux Loft, leur sincérité tant humaine que spirituelle ne seront pas oubliées. Ainsi qu’elle le souligne dans Retour à Tyendinaga :
Je crois que leur dignité (des Loft), leur confiance en Dieu, leur adhésion sans faille aux croyances spirituelles qu’ils avaient mis si longtemps à trouver, leur profonde fierté de leur héritage culturel, leur amour pour leur famille, pour leur peuple, et leur amour universel pour le genre humain ressortiront dans les histoires racontées dans ce livre; de même que leur bon sens et leur côté humain captiveront les cœurs.
Retour à Tyendinaga, l’histoire de Jim et de Melba Loft, est disponible en ligne à One Voice Press. Le prochain lancement du livre se tiendra dans la ville de Patricia, à Cochrane, en Alberta, le 28 avril 2012 et d’autres seront organisés par la suite.