Plus de 1800 personnes ont assisté à la 34e conférence annuelle de l’Association d’études bahá’íes, qui a eu lieu du 12 au 15 août à Vancouver. Le programme invitait les participants à repenser leur conception de la nature humaine.
Les conférenciers et les participants se sont penchés sur certaines des caractéristiques fondamentales de la nature humaine, à la lumière des concepts et principes bahá’ís, et ils ont tenté de comparer ce qu’ils ont compris aux suppositions de la société contemporaine et aux idées qui émergent dans certains discours scientifiques et spécialisés sur la nature humaine.
Au cours des séances plénières de la conférence, certains aspects de la conception de la nature humaine, tirés de la pensée et de la vie de Bahá’u’lláh et de ‘Abdu’l-Bahá, ont pu être énoncés. Mais il a été plus difficile de faire le lien entre ces concepts bahá’ís et ceux qui sont véhiculés dans divers domaines d’étude et de travail.
Plusieurs participants ont répété que nous nous trouvons toujours à une étape préliminaire. D’autres ont dit que le thème de la conférence n’était pas facile à cerner, et que, bien que très opportun, il était très complexe.
Au moins un des conférenciers a dit que la complexité de la question était due au fait que les idées qui influencent la pensée contemporaine au sujet de la nature humaine sont souvent fragmentaires. Quelques autres ont parlé du monopole quasi absolu du matérialisme et de la promotion de l’intérêt égoïste et de l’esprit compétitif dans le discours social, et de ses conséquences sociales désastreuses. D’autres encore ont fait remarquer que les idées sur la nature humaine qui prévalent dans une grande part de la pensée contemporaine sont superficielles et, tout au plus, implicites, qu’on les retrouve dans les discussions sur les politiques, dans la culture en général, dans les activités du secteur privé, ou d’un domaine de travail intellectuel ou de direction. Trop souvent, ces suppositions sur la nature humaine sont perpétuées sans être remises en question. D’autres ont souligné les nouveaux et encourageants efforts qui ont été faits pour s’inspirer des nouvelles conceptions de la nature humaine, en science et dans des domaines de travail intellectuel, et ont encouragé les bahá’ís à y contribuer. On a pu entendre de tels commentaires dans plusieurs petits groupes de discussion, mais Michael Karlberg a exprimé ces idées avec une clarté toute particulière lors de son allocution en séance plénière et de l’atelier qu’il a animé.
À cette séance plénière et à cet atelier, beaucoup de gens étaient d’avis que le besoin d’un effort systématique pour promouvoir de nouvelles façons de penser sur les aspects fondamentaux de la nature humaine était plus urgent que jamais, peu importe la difficulté ou que les modes de vie contemporains laissent peu de place à une remise en question.
En ce qui concerne l’exploration d’une approche bahá’íe visant à mieux comprendre la nature humaine, la conférence a bien commencé. En effet, dans son discours d’ouverture M. Hooper Dunbar, auteur, peintre et ancien membre de la Maison universelle de justice, s’est servi de certains thèmes de son récent livre Forces of Our Time pour examiner la double nature humaine. Il a souligné, entre autres, comment les efforts pour refléter les attributs de Dieu, que la connaissance et l’amour de sa Manifestation rendent possibles, favorisent une existence plus heureuse, plus active et dynamique, et permettent d’éviter une vie sans issue, ennuyante et répétitive, axée sur les préoccupations qu’incite en nous l’aspect matériel et inférieur de la nature humaine, une vie consumée par les intérêts égoïstes, les appétits et les désirs physiques. M. Dunbar, qui est artiste et penseur, a parlé du contraste de l’obscurité et de la lumière qui est présent tout au long de l’existence humaine et qui impose aux être humains de choisir entre les actions qui reflètent la lumière et les qualités divines, et celles qui nient la réalité plus vaste et plus stimulante des possibilités de la vie.
Le Dr Julio Savi, qui était cette année invité à donner la conférence commémorative Balyuzi, a poursuivi l’analyse des idées essentielles à une conception bahá’íe de la réalité humaine, entreprise par M. Dunbar. Il a abordé le paradoxe fondamental, qui, durant des siècles, a rendu les penseurs perplexes dans leurs tentatives pour réconcilier les concepts de détermination et les rapports de cause à effet, d’une part, et la liberté dont semblent jouir les êtres humains, d’autre part.
Le Dr Savi a fait un survol des commentaires les plus pertinents de Bahá’u’lláh, de ‘Abdu’l-Bahá, de Shoghi Effendi et de la Maison universelle de justice sur les contradictions apparentes entre un monde de détermination, qui donne lieu aux idées de destin, de prédétermination, et les concepts de liberté et de libre choix. L’exploration bien développée du Dr Savi des nombreux commentaires faisant autorité a servi à faire ressortir les relations qui existent entre les aspects fondamentaux de l’existence humaine : la contingence, les limites et le potentiel des capacités humaines (innées, héritées et acquises), la nature de la destinée divine et l’objet, ainsi que le potentiel, de la vie humaine. Son allocution a fourni une réponse à cette interprétation simpliste et erronée de la réalité humaine qui est donnée par les conceptions matérialistes et elle a montré comment la liberté et la soumission à la volonté de Dieu sont, non pas contradictoires, mais, en fait, unes et indivisibles.
La nécessité d’en arriver à une meilleure compréhension de la nature humaine est également ressorti d’une autre séance plénière, au cours de laquelle diverses idées et réflexions ont été avancées sur les difficultés d’une réconciliation sociale et culturelle et les occasions qui la favorisent. Plusieurs conférenciers autochtones bien en vue, dont Lee Brown, le chef Douglas White III Kwulasultun et Jacqueline Left Hand Bull, ont offert des commentaires perspicaces sur les dommages et la souffrance qu’ont causés les conceptions erronées de la nature humaine au cours de l’histoire de l’Amérique du Nord. Ils ont aussi montré d’autres manières de comprendre la nature humaine, d’un point de vue autochtone, qui pourraient contribuer – dans la mesure où on fait avancer une vraie réconciliation – à un cadre de référence conceptuel sur la nature humaine, à la fois convaincant sur le plan intellectuel et satisfaisant sur les plans émotionnel et spirituel.
Durant toute la conférence, les participants étaient très conscients des nouvelles de la peine de 20 ans d’emprisonnement imposée aux Yaran, ce comité ad-hoc responsable de voir aux besoins minimums de la communauté bahá’íe d’Iran. Il est difficile d’imaginer une conception plus ténébreuse et erronée de la nature humaine que celle qui guide les personnes responsables de tels crimes contre l’humanité et la justice. Payam Akhavan, spécialiste des droits internationaux de la personne et professeur de droit à l’Université McGill, a abordé ce sujet dans son allocution. Faire référence aux forces obscures qui sont aujourd’hui à l’œuvre dans le monde, et d’une manière si marquée en Iran, ne pouvait qu’inciter les participants à réfléchir davantage au contraste prononcé entre le point de vue bahá’í sur la nature humaine et ce point de vue qui divise la race humaine et refuse désespérément d’accepter la marche de l’histoire, les besoins de notre époque et l’unité de l’humanité. Il aurait été difficile de trouver meilleur exemple de l’immense souffrance et désespoir que la nature humaine peut causer quand nous nous détournons de Dieu, et nous laissons mener par les ignorants et les méchants.
À la dernière séance de la conférence, Alison Milston, membre du Corps continental des conseillers, a examiné les passages où la Maison universelle de justice mentionne l’idée de communauté. Elle a montré comment ces références ont aidé les bahá’ís à apprendre un nouveau langage et à acquérir une nouvelle compréhension de leur propre communauté, une compréhension qui tient compte de l’ensemble de la famille humaine, que ce soit dans le contexte d’un quartier de notre ville ou de la planète entière.
La conférence n’était qu’un début – et aux yeux de bien des participants un début agité et même douloureux – mais cet effort pour réexaminer la nature humaine a fourni une occasion d’apprendre à plus de 1 800 personnes, d’âges et de milieux divers. La conférence a été courte mais son espace et son mode de réflexion ont contribué à une activité d’apprentissage qui est encore aux premières étapes de son évolution.
Si les participants sont repartis avec plus de questions que de réponses, comme cela a sûrement été le cas pour beaucoup d’entre eux, la conférence représentait une étape importante dans le type d’efforts qui doivent être faits pour que la pensée bahá’íe progresse et stimule la pensée contemporaine.