L’article suivant, écrit depuis New York par le journaliste Steven Edwards, a été publié aujourd’hui par Postmedia News :
Jeudi, le Canada a promis de poursuivre son « assaut » diplomatique annuel contre l’Iran aux Nations unies – même si le Conseil des droits de l’homme de cette organisation mondiale avait repris plus tôt jeudi sa surveillance directe de la République islamique après une interruption de neuf ans.
Le ministre des Affaires étrangères Lawrence Cannon a dit à Postmedia News que le gouvernement canadien n’avait pas l’intention de diminuer les pressions qu’il exerce depuis plusieurs années pour que l’Assemblée générale de l’ONU adopte une résolution dénonçant les violations des droits de la personne commises par l’Iran, incluant des exécutions publiques et des arrestations arbitraires.
« Le Canada continuera de réprimander l’Iran pour ses violations extrêmes des droits de la personne », a déclaré M. Cannon à Ottawa. « Nous continuerons à le faire à toutes les occasions qui se présenteront et sur toutes les tribunes appropriées, y compris à l’Assemblée générale, et ce jusqu’à ce que la situation s’améliore de façon marquée. »
Les autorités iraniennes sont furieuses de la campagne annuelle du Canada et luttent contre l’adoption de cette mesure – ce qu’elles ont fait une année en publiant un ouvrage faisant état de ce qu’elles décrivaient comme les violations des droits de la personne perpétrées par le gouvernement canadien.
Ottawa a lancé son offensive après que la Commission des droits de la personne à Genève, que le Conseil des droits de l’homme a remplacée, cessa en 2002 de soulever la situation en Iran, et que des États voyous sur le plan des droits de la personne commencèrent à dominer cette organisation. Simultanément, l’Union européenne cessait de soumettre à l’Assemblée générale des résolutions critiquant les pratiques de l’État iranien, choisissant plutôt de « dialoguer » avec l’Iran sur les questions liées aux droits de la personne.
C’est plus spécifiquement la torture et le meurtre en 2003 de la photojournaliste Zahra Kazemi dans une prison iranienne qui a poussé le Canada à l’action. Le Canada a en effet soumis sa première résolution sur l’Iran cette année-là.
Jeudi, à l’instigation des États-Unis, le Conseil des droits de l’homme, qui compte 47 États membres, a décidé de nommer un investigateur pour l’Iran. La résolution a été adoptée par 22 voix contre sept et quatorze membres se sont abstenus de voter.
Bien que le Canada ne fasse pas partie du Conseil, il a appuyé la résolution qui exige que l’Iran « collabore pleinement » avec l’investigateur. La résolution indique que le Conseil « regrette » le « manque de coopération » de la part de l’Iran pour répondre aux demandes contenues dans la plus récente résolution, qui avait été soumise par le Canada et a été adoptée par l’Assemblée générale. Elle exhorte l’Iran à mettre fin aux flagellations, aux amputations et aux exécutions par lapidation et par étranglement.
Le ministre Cannon était un des représentants des divers pays qui ont demandé qu’un investigateur soit désigné. Il a fait sa plus récente demande dans un discours prononcé le mois dernier devant le Conseil.
Les membres de la Communauté internationale bahá’íe, qui compte 30 000 membres au Canada, se sont joints aux autres groupes qui ont accueilli favorablement cette action. Ils poursuivent leur campagne pour faire cesser la persécution des bahá’ís en Iran. Cette religion a son origine en Iran mais les autorités iraniennes considèrent que ses fidèles sont apostats.
« Ils violent les droits fondamentaux des bahá’ís depuis des dizaines d’années, mais depuis quelques temps ils infligent le même traitement à la population musulmane », affirmait à Genève Bani Dugal, la principale représentante bahá’íe aux Nations unies. « La communauté internationale montre qu’elle en a assez », a-t-elle ajouté, en soulignant que « même la Malaisie », un état musulman, s’est abstenue de voter plutôt que de s’opposer à la résolution – rompant ainsi avec la solidarité habituelle entre pays musulmans.
Mais le groupe de défense des droits fondamentaux, UN Watch, dont les bureaux sont à Genève, a dit qu’il ne faudrait pas interpréter l’adoption de cette résolution contre l’Iran comme une indication de changements plus généraux au sein du Conseil.
« Malheureusement, l’Iran est une des rares exceptions à la règle voulant que le Conseil ignore la grande majorité des dictatures les plus impitoyables, comme la Chine, la Syrie et le Zimbabwe », affirmait Hillel Neuer, directeur administratif de UN Watch.
« Une obsession anti-Israël continue de se manifester, cette semaine par une série sans précédent de six résolutions (sur ce pays), et par une imposture de programme de réformes sur cinq ans qui maintient perpétuellement un point à l’ordre du jour sur Israël », a-t-il ajouté, en mentionnant des mesures qui ont pour effet de porter une attention démesurée sur Israël en comparaison aux autres pays.
Malgré cela, Eileen Donahoe, l’ambassadrice américaine au Conseil, a parlé positivement de son évolution, cette semaine.
« Bien que le Conseil continue d’être une organisation imparfaite, nous avons observé un progrès marqué pour ce qui est de sa capacité de répondre immédiatement aux situations qui se produisent dans le monde au sujet des droits fondamentaux », disait Mme Donahoe mercredi.
Elle s’exprimait en attendant l’adoption de la résolution sur l’Iran et d’une autre résolution devant être adoptée jeudi au sujet de l’intolérance religieuse, qui, cette année, exclut toute référence à la « diffamation de la religion », un terme que les pays musulmans avaient réussi à inclure après des années d’efforts. Le Canada et d’autres pays occidentaux sont d’avis qu’un tel langage pourrait servir à limiter la liberté d’expression.
Mme Donahoe a aussi fait remarquer que, étant donné les violations des droits de la personne perpétrées dans ce pays au cours du conflit actuel, le Conseil avait récemment demandé à l’Assemblée générale d’expulser la Libye.
Alors que les principaux représentants de ce pays aux Nations unies rejetaient le régime de Mouammar Kadhafi et votaient en faveur de l’expulsion, l’Assemblée générale, qui compte 192 membres, approuvait unanimement l’expulsion de la Libye.