Trois experts renommés des droits de l’homme des Nations Unies ont lancé, le 4 septembre, un appel à l’Iran pour que soit mis fin à la destruction en cours d’un cimetière bahá’í historique à Chiraz, disant que cet acte est une violation « inacceptable » de la liberté de religion.
Dans un communiqué commun, Heiner Bielefeldt, le rapporteur spécial sur la liberté de religion ou de conviction, Ahmed Shaheed, le rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en Iran, et Rita Izsak, l’experte indépendante auprès des Nations unies sur les questions relatives aux minorités, ont déclaré qu’ils étaient « consternés » par les informations rapportant que les travaux de démolition avaient repris en août.
« Les cimetières, comme les lieux de culte, sont une partie essentielle de la façon dont les gens exercent et manifestent leur droit à la liberté de religion ou de conviction. Leur importance va au-delà de leur présence physique », a déclaré M. Bielefeldt.
« Les attaques contre les cimetières sont inacceptables et constituent une violation délibérée de la liberté de religion ou de conviction, a-t-il ajouté. Le gouvernement d’Iran doit prendre des mesures urgentes. »
M. Shaheed a expliqué que « les bahá’ís ont des rites et des pratiques religieuses pour l’enterrement des défunts dans leurs propres cimetières et le gouvernement a l’obligation non seulement de les respecter, mais de les protéger de la destruction ».
Mme Izsak a exhorté le gouvernement iranien à prendre des mesures concrètes pour protéger les minorités religieuses.
« Les bahá’ís ont été soumis à la persécution et à des actes de violence, a précisé Mme Izsak. Les autorités doivent les protéger de davantage de discrimination et de stigmatisation. »
« Des mesures devraient être mises en place pour protéger et maintenir le patrimoine culturel des minorités religieuses, y compris les lieux de sépulture et les autres sites d’importance religieuse », a-t-elle ajouté.
Le cimetière est le lieu de repos de 950 bahá’ís, dont beaucoup étaient des personnages historiques ou de premier plan dans la communauté bahá’íe d’Iran. Par exemple, dix femmes bahá’íes sont enterrées à cet endroit, des femmes dont la pendaison cruelle en 1983 est devenue un symbole de la persécution meurtrière des bahá’ís par le gouvernement.
La démolition sur le site, entreprise par les Gardiens de la révolution iraniens, a commencé en avril, apparemment pour faire place à la construction d’un nouveau centre sportif et culturel.
Après le creusement d’une large excavation peu profonde, la démolition a été interrompue pendant plusieurs mois, face à la pression internationale et à l’expression de l’indignation de la part d’Iraniens de toutes conditions sociales.
Mais en août, des rapports sont parvenus d’Iran, informant que les Gardiens de la révolution avaient repris la construction sur le site, enlevant les restes humains de quelque 30 à 50 tombes et coulant la fondation en béton pour le complexe, qui devrait comprendre notamment une bibliothèque, une mosquée, un restaurant, un théâtre, une crèche et un jardin d’enfants, ainsi qu’une salle de sport.
Les membres de la communauté bahá’íe de Shiraz ont supplié les autorités locales d’ordonner de façon définitive l’arrêt de la construction, offrant aussi un compromis dans lequel le complexe sportif serait construit à cet emplacement, en dehors des zones où les bahá’ís sont enterrés, tandis que le cimetière lui-même serait transformé en un espace vert.
Il leur a toutefois été répondu que les autorités locales n’avaient aucun contrôle sur les Gardiens de la révolution, qui ont acquis l’endroit il y a environ trois ans.
Diane Ala’i, la représentante de la Communauté internationale bahá’íe auprès des Nations Unies à Genève, s’est réjouie de la déclaration des trois fonctionnaires de l’ONU.
« Nous sommes reconnaissants pour la position ferme que ces trois experts indépendants des droits de l’homme ont prise concernant la situation à Shiraz », a déclaré Mme Ala’i.
« La déclaration de M. Bielefeldt, de M. Shaheed et de Mme Izsak est un signal clair envoyé à l’Iran que ces actes sont totalement inacceptables, et qu’il est de la responsabilité du gouvernement de faire respecter et de mettre en œuvre ses engagements envers la législation sur des droits de l’homme, indépendamment de l’identité des auteurs. »
« Le gouvernement actuel a fait de nombreuses promesses pour améliorer son bilan en matière des droits de l’homme, mais a négligé de prendre des mesures. Les mots doivent maintenant être suivis par des actes », a expliqué Mme Ala’i.