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Une survivante du génocide au Rwanda visite le Canada

Denyse Umutoni, une survivante du génocide rwandais, considère que le Canada est un exemple édifiant pour le reste du monde.

« Votre société est composée de tous les peuples du monde, vivant paisiblement dans un même pays et jouissant d’un niveau relativement élevé d’unité », a dit Mme Umutoni.Denyse Umutoni du Rwanda

Mme Umutoni, qui est une importante porte-parole de la cause des droits de la personne, a été invitée au Canada pour se joindre à un groupe de 36 jeunes gens venus de tous les coins du monde pour participer au Forum international des jeunes dirigeants et à la Conférence mondiale sur la prévention du génocide, tenue la semaine dernière à Montréal. Elle a, de plus, assisté à la première du film J’ai serré la main du diable, pour lequel elle a été assistante à la production.

Mme Umutoni participe présentement à une tournée canadienne et à échange culturel d’un mois, rendus possibles par la Fondation Simone Kendall. Elle rencontre aussi de nouveaux collaborateurs et participe à des conférences publiques sur la paix et la résolution de conflits, organisées par la communauté bahá’íe du Canada.

L’univers de Mme Umutoni s’est désintégré violemment en avril 1994, quand elle a été témoin du meurtre brutal de sa famille au cours de ce qui a plus tard été appelé le génocide rwandais. Ce qui lui est arrivé dans les minutes et les semaines suivantes, pendant lesquelles elle a perdu près de 180 des 200 membres de sa famille élargie, a été encore pire.

Sa survie après ces événements atroces a été un miracle, mais un miracle encore plus grand est le fait qu’elle a consciemment choisi de ne pas devenir une ombre de ce qu’elle avait été. Elle a choisi de réaliser les derniers vœux de son père mourant qui lui a demandé de continuer à être la personne forte, aimante et généreuse qu’il connaissait et de ne pas permettre à l’inhumanité extrême de la situation dans laquelle elle était plongée de l’avilir.

Mme Umutoni a plus que survécu. Plutôt que de perdre espoir, elle s’est engagée à la « reconstruction du Rwanda », au « renforcement de l’unité au sein de la société rwandaise », et à la création d’une « paix durable ».

Depuis 2001, Mme Umutoni a participé aux activités de diverses organisations pour la défense des droits de la personne, dont CESTRAR, un syndicat de travailleurs du Rwanda, qui a été la première organisation de ce type à obtenir la reconnaissance des droits des travailleurs. En tant que présidente de l’Association des messagers de paix (AMP) et avec l’aide du gouvernement allemand, Mme Umutoni a établi des associations des droits de la personne dans toutes les écoles secondaires du Rwanda.

Elle est aussi coordinatrice nationale d’un programme très efficace de sensibilisation du public, appelé Cineduc, mis en œuvre dans tout le Rwanda. Ce programme porte sur les grandes questions sociales et il est financé par le service allemand de développement (le DED) et par UNICEF. Cineduc a réussi à sensibiliser les habitants des régions rurales à diverses questions, comme l’abus d’alcool ou d’autres drogues, la gestion des conflits, les droits de l’enfance et des femmes, la discrimination raciale et la réconciliation des groupes ethniques.

En 2004, à l’occasion du dixième anniversaire du génocide, Mme Umutoni a organisé un effort pour extraire 3000 corps d’une fosse commune, dont celui de ses propres parents, et elle a vécu une transformation spirituelle qui a mené à l’établissement de Cineduc.

Mme Umutoni, qui a grandi dans une famille catholique, explique qu’un autre changement est survenu au cours des deux dernières années, cette fois sur le plan de son travail dans le domaine des droits de la personne, quand elle s’est mise à étudier les enseignements de la foi bahá’íe, dont elle est maintenant membre. Après la dévastation du génocide, ces enseignements l’ont aidée à rétablir un rapport avec Dieu, mais, elle a aussi été extraordinairement émue de penser qu’un enseignant divin, possédant les remèdes aux problèmes présents pouvait exister. Elle dit que les enseignements bahá’ís sur l’amour, l’harmonie et l’unité du genre humain correspondent exactement à « ce dont la société rwandaise a besoin quotidiennement ».

Son voyage au Canada est pour Mme Umutoni une excellente occasion d’élargir le dialogue sur les droits de la personne. Elle espère que le dialogue et la consultation seront mutuellement bénéfiques et qu’ils bénéficieront à la collectivité dans son ensemble.

« L’apprentissage va dans les deux sens », dit Mme Umutoni, qui est venue pour parler de son expérience et des leçons à tirer de l’histoire récente du Rwanda, mais aussi pour encourager l’échange d’idées avec des canadiens, au sujet de la nature des défis sociaux. « Je veux rencontrer de nouvelles personnes qui ont leur propre expérience et découvrir ce qui se fait au Canada », explique-t-elle.

L’itinéraire de Mme Umutoni, qui comportait des visites à l’île de Vancouver, à Montréal et à Québec lui a permis d’avoir des discussions avec des spécialiste en counselling, de prendre la parole devant les étudiants de l’École internationale Maxwell, à Shawnigan Lake, en Colombie-Britannique et de l’école secondaire Stelly’s à Victoria et devant les communautés autochtones d’Alert Bay, en Colombie-Britannique, et de Montréal, au Québec.

Fraser Syme, qui enseigne un cours présentant divers points de vue sur la situation mondiale à l’école secondaire Stelly’s, et dont les étudiants ont organisé une période pour permettre à 600 étudiants de la onzième et de la douzième année d’entendre Mme Umutoni, a dit qu’il n’avait jamais rien vu de pareil : « Après, les jeunes ont fait la ligne pour venir l’embrasser. » Selon M. Syme, les étudiants qui ont été charmés par sa nature désarmante et étonnés du fait qu’elle n’a aucune haine envers ceux qui sont responsables du génocide, ont vraiment assimilé son message, qui, selon lui, se résume par « La guérison est possible, la paix est possible. »

Au cours de ses visites dans des communautés autochtones au Canada, Mme Umutoni a été accueillie avec la même chaleur et la même affinité d’esprit. Mme Umutoni a constaté que, tout comme ses concitoyens rwandais, les autochtones du Canada « font des efforts considérables pour découvrir leurs propres points forts, pour découvrir la vérité et pour bâtir une société qui repose sur ces valeurs. »

Quand on lui a demandé quelle différence elle voyait entre les rwandais et les peuples des Premières nations, elle a plaisanté en disant « La seule différence est qu’ils vivent sur différents continents. »

Quant elle discute des problèmes sociaux qui existent partout dans le monde, qu’il s’agisse de toxicomanie, de mauvais traitements, de racisme, de discrimination ou de génocide, Mme Umutoni ramène toujours son auditoire au seul problème qui en est la cause : la désunion. Pour illustrer son point, elle conclut souvent ses allocutions en citant cet extrait de Les Paroles cachées, un texte des Écrits bahá’ís :

« O enfants des hommes! Ignorez-vous pourquoi nous vous avons tous créés de la même poussière ? Afin que nul ne s’élève au-dessus des autres. Méditez sans cesse en votre cœur comment vous fûtes créés. Puisque nous vous avons créés d’une seule et même substance, il vous convient d’être comme une seule âme, de marcher du même pas, de manger de la même bouche et de vivre dans le même pays. » (Paroles révélées en arabe, no 68)

Selon Mme Umutoni, en nous rappelant simplement les-uns les-autres que nous appartenons tous à la famille humaine, nous pouvons nous encourager mutuellement à progresser vers la création d’une société mondiale plus pacifique.

Ses paroles d’encouragement aux canadiens, à qui elle répète « Continuez à bâtir l’unité, continuez à décloisonner le monde ! », font bien écho à cette idée.


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The Montreal Gazette - Films help Rwandans heal [Des films aident les rwandais à guérir]The Edmonton Journal - Group fights Rwanda killings with classic movies [En réponse aux tueries du Rwanda, un groupe se sert du cinéma]